« On constate que le babouin et l’homme se séparent sur la façon de répondre aux besoins naturels. Le singe reste prisonnier de sa bestialité, alors que l’homme peut s’en défaire, partiellement, totalement, ou la différer, y résister, la dépasser en lui donnant une forme spécifique. D’où la culture. Face aux besoins, aux instincts et aux pulsions qui dominent l’animal intégralement et le déterminent, l’homme peut choisir d’exercer sa volonté, sa liberté, son pouvoir de décision. Là où le babouin subit la loi de ses glandes génitales, l’homme peut lutter contre la nécessité, la réduire, et inventer sa liberté.
Ainsi en matière de sexualité invente-t-il l’amour et l’érotisme, le sentiment et les jeux amoureux, la caresse et le baiser, la contraception et le contrôle des naissances, la pornographie et le libertinage, autant de variations sur le thème de la culture sexuée. De même, en ce qui concerne la soif et la faim : les hommes dépassent les besoins naturels en inventant des façons spécifiques d’y répondre (techniques de cuisson, de salage, de fumage, de boucanage, de fermentation), ils se servent des épices, inventent la cuisine et la gastronomie. De sorte que l’érotisme est à la sexualité ce que la gastronomie est à la nourriture : un supplément d’âme, une valeur intellectuelle et spirituelle ajoutée au strict nécessaire, ce dont les animaux sont incapables. » Michel Onfray, Antimanuel de philosophie, p. 32.