Un autre commandement célèbre est : "Aime ton prochain comme toi-même".
Il s'adresse à des individus singuliers en relation avec des individus singuliers, relation qui est entendue comme ayant lieu entre le singulier et le singulier, ou comme relation de sensibilité. L'amour actif, - car un amour inactif n'a aucun être et, par conséquent, ce n'est pas de lui qu'on entend parler - se propose d'éloigner le mal d'un homme et de lui apporter le bien. A cet effet, il faut discerner ce qui en cet homme est le mal, ce qui est le bien approprié contre ce mal, ce en quoi consiste en général sa prospérité, c'est-à-dire que je dois aimer cet homme avec intelligence ; un amour inintelligent lui nuirait peut-être plus que la haine. Mais le bienfait intelligent et essentiel est, dans sa figure la plus riche et la plus importante, l'opération universelle et intelligente de l'État, une opération en comparaison de laquelle l'opération du singulier comme singulier devient quelque chose de si insignifiant qu'il ne vaut presque pas la peine d'en parler.
Au reste, cette opération de l'État est d'une si grande puissance que, si l'opération singulière voulait s'opposer à elle, si elle voulait ou être uniquement pour soi comme crime, ou pour l'amour d'un autre tromper l'universel en ce qui regarde le droit et la part qu'il a en lui, cette opération singulière serait tout à fait inutile et irrésistiblement brisée. Ce bienfait, qui est du domaine de la sensibilité, ne garde donc plus que la signification d'une opération entièrement singulière, d'une assistance qui est aussi contingente que momentanée.
HEGEL