Hegel - distinguer le Droit et la morale

Le droit ne dépend pas de l’intention qu’on a en agissant. On peut faire quelque chose avec une excellente intention, la conduite n’est pas pour autant justifiée, mais peut être, sans qu’on y prenne garde, contraire au droit. D’autre part, une conduite, par exemple l’affirmation de ma propriété, peut être juridiquement tout à fait justifiée de faire place cependant à une intention méchante, dans la mesure où il ne s’agit pas de seulement pour moi de défendre mon droit, mais bien plutôt de nuire à autrui. Sur le droit comme tel cette intention n’a aucune influence.
Le droit n’a rien à voir avec la conviction que ce que j’ai à faire soit juste ou injuste. Tel est particulièrement le cas en ce qui concerne la punition. On tâche sans doute de persuader le criminel qu’il est puni à bon droit. Mais qu’il en soit ou non convaincu ne change rien au droit qu’on lui applique.
Enfin le droit ne dépend non plus en rien de la disposition d’esprit dans laquelle un acte est accompli. Il arrive très souvent qu’on agisse de façon correcte par simple crainte de la punition, ou parce qu’on a peur de n’importe quelle autre conséquence désagréable, telle que perdre sa réputation ou son crédit. Il se peut aussi qu’en agissant selon le droit on songe à la récompense qu’on obtiendra ainsi dans une autre vie. Le droit comme tel est indépendant de ces dispositions d’esprit.
 

                                                                                                                                                               Hegel, Propédeutique philosophique  ≈ 1810