Nietzsche - la volonté de puissance

Vouloir se conserver soi-même est l’expression d’une situation de détresse, d’une restriction de la véritable pulsion fondamentale de la vie, qui tend à l’expansion de puissance et assez souvent, dans cette volonté, elle remet en cause et sacrifie la conservation de soi. […] La lutte pour la vie n’est qu’une exception, une restriction momentanée de la volonté de vivre ; la grande et la petite lutte tournent partout autour de la prépondérance, de la croissance, du développement et de la puissance, conformément à la volonté de puissance qui est précisément volonté de vie.

                                                                                                                                 Le Gai savoir, § 349

 

Un être vivant veut avant tout déployer sa force. La vie même est volonté de puissance, et l’instinct de conservation n’en est qu’une conséquence indirecte et des plus fréquentes.

                                                                                                                         Par-delà bien et mal, § 13

 

 [V]ivre, c’est essentiellement dépouiller, blesser, dominer ce qui est étranger et plus faible, l’opprimer, lui imposer durement sa propre forme, l’englober et au moins, au mieux, l’exploiter […]. Tout corps […] devra être une volonté de puissance, il voudra croître, s’étendre, accaparer, dominer, non pas par moralité ou immoralité, mais parce qu’il vit et que la vie est volonté de puissance.

                                                                                                                        Par-delà bien et mal, § 259

 

 Si l'essence la plus intime de l'être est volonté de puissance, si le plaisir est toute croissance de la puissance, déplaisir tout sentiment de ne pouvoir résister et maîtriser : ne pouvons-nous pas alors poser plaisir et déplaisir comme des faits cardinaux ? »

                                                                                                                                      (Posthume)

 

 « La vie est, à mes yeux, instinct de croissance, de durée, d'accumulation de force, de puissance : là où la volonté de puissance fait défaut, il y a déclin. »

                                                                                                                                        L’Antéchrist


« Si rien ne nous est « donné » comme réel sauf notre monde d'appétits et de passions, si nous ne pouvons descendre ni monter vers aucune autre réalité que celle de nos instincts — car la pensée n'est que le rapport mutuel de ces instincts, — n'est-il pas permis de nous demander si ce donné ne suffit pas aussi à comprendre, à partir de ce qui lui ressemble, le monde dit mécanique (ou « matériel ») ? Le comprendre (...) comme une réalité du même ordre que nos passions mêmes, une forme plus primitive du monde des passions, où tout ce qui se diversifie et se structure ensuite dans le monde organique (et aussi, bien entendu, s'affine et s'affaiblit) gît encore d'une vaste unité ; comme une sorte de vie instinctive où toutes les fonctions organiques d'autorégulation, d'assimilation, de nutrition, d'élimination, d'échanges sont encore synthétiquement liées ; comme une préforme de la vie ? — (…) En fin de compte la question est de savoir si nous considérons la volonté comme réellement agissante, si nous croyons à la causalité de la volonté. Dans l'affirmative — et au fond notre croyance en celle-ci n'est rien d'autre que notre croyance en la causalité elle-même — nous devons essayer de poser par hypothèse la causalité de la volonté comme la seule qui soit.

                                                                                                                           Par-delà bien et mal, §36